jeudi 23 septembre 2010

Montréal

(…), il m’a suffi de feuilleter le quotidien anglophone la Gazette pour trouver la page des agences d’escortes, il m’a suffi de prendre le téléphone et de composer un numéro, celui de la plus importante agence de Montréal, (…). (Putain, p. 15).

(…), I’d already been appointed a whore, I was a whore before I was one, all I needed was to leaf through the anglophone daily, the Gazette, and find the escort agencies page, all I needed was to dial a number, the number of Montreal’s most prestigious agency, (…). (Whore, p. 9).

Je suis l’unique lien de mon père avec le cadavre de ma mère, moi, leur fille chérie suicidée mille fois par noyade dans le bain d’un appartement perdu au cœur de Montréal, moi tournée vers la fenêtre dont les rideaux se referment sur le campus de l’université McGill, (…). (Putain, p. 124).

I’m the only link between my father and the corpse of my mother, me, their cherished daughter who’s committed suicide a thousand times by drowning in the bathtub of an apartment lost in the heart of Montreal, me, turned toward the window whose curtains close on the campus of McGill University, (…). (Whore, p. 112).

Jean de Hongrie est le seul Hongrois qui ait jamais mis les pieds à Montréal, enfin c’est ce qu’il dit, il a un petit bras qui pend de son épaule, un bras sans muscle qu’il ne peut pas faire bouger, étrangement inutile, un bras avorté, suspendu à mi-chemin de son parcours, (…). (Putain, p. 134).

Jean the Hungarian is the only Hungarian who has ever set foot in Montreal, at least that’s what he says, he has a little arm that hangs from his shoulder, (…). (Whore, p. 121-122).

(…), j’ai deux ou trois copines avec qui je tente de concilier ce qui se passe dans ma tête et ce qui se passe ici, dans cet appartement qui s’ouvre sur le cœur anglais de Montréal, (…). (Putain, p. 146).

(…), I have two or three buddies with whom I try to reconcile what’s happening in my head with what happens here in this apartment overlooking the heart of English-speaking Montreal, and also, these are young whores like me, (…). (Whore, p. 133).

Ce soir-là on s’est départagé les bars de Montréal pour éviter de se croiser sans mentionner que Freddy, quelques jours plus tôt, avait dit en parlant des couples qui se séparent qu’interdire à l’autre des secteurs précis de la ville était une façon de lui donner rendez-vous. (Folle, p. 24).

Tout le monde peut comprendre qu’une moins-que-rien comme moi ait peur de son ombre, on peut comprendre aussi qu’elle ait peur de reconnaître dans tous les bruns de Montréal ta démarche immense (…). (Folle, p. 25-26).

Avec toi chaque événement devait se rendre au bout de lui-même, c’est pourquoi une fille que tu as embrassée à la SAT, le plus subventionnée des bars techno de Montréal, (…). (Folle, p. 27).

On vit à une époque où il y en a tant, à pleines pages dans les revues de mode et écrit en toutes lettres dans les tarots de ma tante, l’amour qui déborde des petites annonces et qui se prescrit par les médecins, l’amour devenu un droit pour lequel les homosexuels montrent leurs queues une fois l’an dans les rues de Montréal, l’amour qui prend forme à trois heures du matin dans les chiottes de bar, (…). (Folle, p. 34).

Pendant cette semaine-là tu n’as jamais deserré ton étreinte, si bien que sur le chemin du retour à Montréal tu as voulu que je pose ma tête sur tes genoux pendant que tu conduisais. (Folle, p. 46).

Pendant ce printemps dernier qui a été le plus fleuri que Montréal ait connu depuis que j’y suis installée, je me suis terrée chez moi pour regarder la télévision du lever au coucher parce que je savais que te surprendre gambadant sur le Plateau dans une vie qui continuait sans la mienne m’aurait achevée. (Folle, p. 86).

Elle portait également le blouson Orion bleu électrique recouvert d’étoiles argentées qu’un de ses ex lui avait offert et qui l’identifiait au-delà de tout doute puisqu’il n’en existait qu’une douzaine à Montréal, un pour chaque DJ du regroupement. (Folle, p. 117).

Tu m’as dit d’elle qu’elle était très proche de Nadine, que d’ailleurs tous les DJ de Montréal étaient proches de Nadine ainsi que toute la clientèle de la scène techno, aussi tu regrettais d’avoir été proche d’elle comme tout le monde parce que tu n’étais pas n’importe qui. (Folle, p. 151-152).

Jamais le soleil n’avait paru plus près de la Terre qu’en ce jour-là. Il faisait même peur à voie, donnait l’impression de s’être agenouillé, prosterné sur le corps de Montréal en géant débile qui méconnaît sa force. (À ciel ouvert, p. 11).

Le chant venait de l’ouest de Montréal, du boulevard Saint-Laurent qu’elle avait déjà parcouru mille fois à pied, et ce n’était pas celui des musulmans mais des adeptes de Krishna. (À ciel ouvert, p. 13).

De son toit elle avait une vue sur ce boulevard comme sur tous les points de repère de la ville : le mont Royal portant sa croix, le stade olympique, les ponts Jacques-Cartier et Champlain, les principaux gratte-ciel, sans compter les milliers de toits à perte de vue qui formaient, parce qu’ils recouvraient le quotidien des Montréalais, le vrai Montréal, son cœur caché prêt à sortir pour battre dans les rues, pour faire du bruit. (À ciel ouvert, p. 13-14).

Tu lui as dit que tu voulais écrire un scénario sur le monde de la mode, sur les photographes de Montréal. (À ciel ouvert, p. 16-17).

Le ciel se repliait sur lui-même, masse de colère grise qui charriait en eau l’équivalent d’un lac et qui, aidée d’un grand vent qui s’était levé, s’était vidée d’une traite sur Montréal dans une immense crevaison, (…). (À ciel ouvert, p. 21).

Mais il y avait tant de femmes à Montréal qui étaient à son goût que cela jouait contre elles, contre lui aussi qui avait développé une résistance à ses propres penchants. (À ciel ouvert, p. 30).

Une race de jeunes chiennes, prenait-elle plaisir à imaginer, jouant de la tension qu’elles créent, rêvant de sortir au plus vite du Montréal chiennes pour faire leurs chienneries ailleurs, dans un plus grand univers chiennes, comme à Milan. (À ciel ouvert, p. 42).

Montréal comptait encore plus de femmes que d’habitude. Au Plan B on en était à trois femmes pour un homme, au Baraka et à l’Assommoir, le ratio pouvait aller plus loin. Dans le Mile-End et dans tous les restaurants du Plateau, toujours ce désavantage numérique chez les femmes en trop grand nombre où, en plus, elles battaient des records de jeunesse. (À ciel ouvert, p. 43).

Avant j’étais assistant. J’aime ça mais au début c’était dur. Montréal n’est pas très grand et il y a pas mal de photographes. (À ciel ouvert, p. 54).

Ce cauchemar avait duré plus d’un an, après quoi Diane avait repris sa garde, elle l’avait emmené vivre avec elle et sa sœur à Magog, non loin de Montréal. (À ciel ouvert, p. 60).

« Je connais pas mal de chirurgiens à Montréal », avait renchéri Julie, qui détaillait le reste du corps de Rose, comme pour s’y mettre à jour. (À ciel ouvert, p. 72).

En fumant elle tenait à l’œil des bouquets de nuages blancs qui apparaissaient çà et là dans le ciel, qui se formaient à une vitesse inquiétante au-dessus du grand Montréal, capitale nord-américaine du réchauffement de la planète. (À ciel ouvert, p. 77).

À Montréal le Plateau est le quartier où la concentration de femmes est la plus forte. Mais tu devrais voir au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Les statistiques se contre-disent mais selon les plus sombres on compte sept femmes pour un homme. (À ciel ouvert, p. 89).

J’ai jamais su pourquoi. Mais les endroits les pires sont les restaurants, à Montréal comme ailleurs. Les femmes sortent en groupes dans les restaurants, c’est frappant. La pire fois c’était chez Bu, un bar à tapas. J’ai compté tout le monde plusieurs fois. Que des femmes, quarante-trois, et un seul homme. Un seul! (À ciel ouvert, p. 89).

Isabelle lui avait raconté le détail de sa vie à Madrid où elle allait, de loin en loin, faire du modeling mais surtout se prostituer, comme elle avait l’habitude de le faire à Montréal, Londres ou Paris. (À ciel ouvert, p. 98).

Les guerres du monde entier et les tempêtes de pluie déferlant Montréal pourraient s’en donner à cœur joie, tant qu’il lui serait permis de retrouver Charles dans un café le midi, et le soir chez elle, avec ou sans alcool. (À ciel ouvert, p. 138-139).

Selon Rose la population à la naissance se composait de 52% de filles et de 48% de garçons, alors qu’en réalité, avait découvert Julie, qui était allée vérifier sur Internet les satistiques démographiques du Québec, c’était le contraire. Mondialement, pouvait-on aussi lire, naissaient 105 petits garçons pour 100 petites filles, et le Québec ne faisait pas exception : en 2001 étaient nés 37 033 garçons pour 34 709 filles, et en 2003, 37 127 garçons pour 35 066 filles. Encore cette même année, toujours au Québec, on comptait, de 0 à 4 ans, 190 048 garçons pour 179 590 filles. Si les femmes étaient plus nombreuses sur Terre, c’était parce que le taux de mortalité était plus élevé chez les hommes, à tous les âges; et si les femmes étaient plus nombreuses que les hommes à Montréal, en particulier dans les quartiers branchés, ce n’était pas parce qu’elles y naissaient en plus grand nombre que les hommes mais parce qu’elles étaient plus nombreuses à choisir de s’y installer. C’était aussi simple que cela. Elle était là, la différence dont parlait Rose, et Rose, qui aurait dû se réjouir, préférait mentir pour rester partout en famille, même en dehors de son Saguenay. (À ciel ouvert, p. 150-151).

Montréal était à son plus mort, certains restaurants ne prenaient même plus la peine d’ouvrir, et d’autres n’offraient aux regards que leur intérieur vide, traversé çà et là d’un serveur désoeuvré. (À ciel ouvert, p. 156).

Dehors c’était sale et mouillé. Ce qui restait de neige ne pouvait pas s’appeler neige tellement son aspect était le contraire de cette matière blanche, volatile et cotonneuse qui avait recouvert son pays pendant des siècles et qui avait fait sa renommée, la base de son folklore; la neige en mutation était devenue de la croûte noire mêlée à de la boue; Montréal la Truie était plus sale que jamais et ses nettoyeurs, ses employés qu’on appelait les cols bleus, étaient encore une fois en grève, ils utilisaient la crasse comme moyen de pression sur les Montréalais qui devaient ensuite se plier à leurs exigences salariales. Le bien-être social était pris d’assaut par des éboueurs qui leur mettaient le nez dans leur propre merde, et Montréal ressemblait à un dépotoir pire que New York, avait pensé Rose ce jour-là, même si elle n’était jamais allée à New York. (À ciel ouvert, p. 164-165).

En cette tombée du jour où descendait doucement le manteau étoilé du ciel sur Montréal, elle en avait eu pour son argent, et pour longtemps. (À ciel ouvert, p. 167-168).

Dans la rue les hommes ne se retournaient plus sur elle ou plus autant qu’avant, elle se fondait dans Montréal et sa foule de marcheurs dépareillés, (…). (À ciel ouvert, p. 182).

Tout de suite après elle se réveillait dans la salle de réveil d’une clinique de chirurgie esthétique de l’ouest de Montréal, non pas d’un coup mais par étales, émergeant de l’inconscience pour y replonger comme un dauphin lancé sur une ligne d’eau. (À ciel ouvert, p. 197).

Le bruit ténu de la nature trouvait ici son espace de résonance, contrairement au centre-ville de Montréal où des pigeons roucoulaient dans le trafic en polluant de leurs crottes les voitures er les rues, fréquentaient les clochards qui déambulaient avec des sacs en plastiques bourrés d’autres sacs en plastique, parfois entourés de gros chiens. (À ciel ouvert, p. 201).

Dans le ciel couvert de nuages le mouvement s’intensifiait, le vent bousculait les parasols sur le toit, un vent chaud cependant, qui annonçait peut-être un orage. Montréal n’avait pas fini de s’éveiller à l’été, aux festivités qui poussaient sa population dans les rues, pour faire battre son cœur, jusqu’en octobre. (À ciel ouvert, p. 251-252).

C’était à n’y rien comprendre. Même aujourd’hui, après avoir fait des recherches pour me rassurer, pour corrober mes perceptions, je n’y comprends toujours rien. Aucun article de presse, aucune plainte adressée à la Ville, comme si le désordre de la numérotisation s’était installé juste pour moi et s’était replacé en ordre après mon départ. (Paradis, clef en main, p. 48).

Quand je me suis assise, après de nombreuses percées manquées, et que j’ai pu avoir une vision moins brouillée du dehors, je me suis aperçue que nous roulions toujours sur le pont Champlain, mais sens inverse : nous entrions dans Montréal au lieu d’en sortir. (Paradis, clef en main, p. 54).

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